Chacun sait qu’il n’est pas aisé de trouver le traitement idéal de la constipation pour chaque patient. Plusieurs lignes de traitements sont parfois nécessaires, plus ou moins efficaces. Dans les cas les plus difficiles, les options thérapeutiques ne sont pas très nombreuses (irrigations, médicaments non remboursés…). Partant de ce constat, la découverte de nouvelles modalités thérapeutiques dans le domaine de la constipation est un scoop en soit.
Les auteurs de cet article nous proposent une toute nouvelle façon de traiter la constipation : l’utilisation d’une capsule vibrante, programmable, ingérée 5 jours sur 7 pendant 8 semaines, permettant de stimuler directement le péristaltisme intestinal et d’augmenter la contractilité colique.
Cet essai multicentrique randomisé de phase 3 en double aveugle, regroupant 95 centres aux Etats-Unis, a inclus 312 adultes souffrant de constipation chronique idiopathique (selon les critères Rome III) résistante aux laxatifs osmotiques et stimulants, entre avril 2019 et juillet 2021. Après une première phase permettant de définir le mode de vibration adapté, 163 patients ont été randomisés dans le groupe capsule vibrante et 149 dans le groupe capsule placebo. Pendant 8 semaines, les patients ont recueilli le nombre de selles par semaine, la consistance, les ballonnements, et les douleurs abdominales. Le critère de jugement principal était l’augmentation d’au moins 1 ou 2 évacuations de selles complètes et spontanées par semaine (CSBM : Complete Spontaneous Bowel Movements) sur au moins 6 semaines sur huit.
Au terme des 8 semaines de suivi, le critère de jugement principal était atteint de façon significative chez 39% des patients sous capsule vibrante (qui avaient noté l’augmentation d’au moins une selle par semaine) versus 22 % dans le groupe placebo (p<0.0001), et 23 % des patients du groupe capsule avaient notifié l’augmentation de plus de 2 selles par semaine (versus 11 % dans le groupe placebo, p<0.0008). Les patients signalaient de façon significative une amélioration de la consistance des selles (p<0.001), de leur qualité de vie selon le score PAC-QOL (p=0.002), et étaient significativement plus satisfaits dans le groupe capsule vibrante que dans le groupe placebo (p<0.001). Aucun effet indésirable grave n’a été signalé dans le groupe capsule vibrante. L’effet secondaire le plus souvent rapporté était la sensation de vibration dans 11 % des cas.
Cet essai randomisé contre placebo, bien mené, nous fait découvrir une option thérapeutique originale de la constipation chronique. L’efficacité de la capsule vibrante devra cependant être confrontée à des études de durée plus longue. En effet, la différence observée sur l’amélioration du transit entre les 2 groupes tendait à diminuer à la 8e semaine. Il faudra donc prouver l’intérêt de ce traitement sur le long terme. D’autres questions restent en suspens. Les cas de constipation réfractaire peuvent faire l’objet d’explorations fonctionnelles permettant d’évaluer la part de constipation dite « de transit » ou terminale. A priori, on pourrait supposer que la capsule vibrante soit plus intéressante pour le traitement de la composante motrice que la dyschésie. Or, aucune mention de cette problématique n’est faite dans l’étude. Enfin, la question du coût (voire du remboursement) de la capsule devra se poser pour en vérifier l’accessibilité pour nos patients.
Au final, de nouvelles données sont nécessaires pour évaluer l’intérêt de la capsule vibrante dans le traitement de la constipation chronique au long terme. Elle constitue néanmoins une innovation technologique originale et prometteuse chez des patients en échec de traitements plus conventionnels. Sa place dans l’arsenal thérapeutique devra bien sûr être précisée dans l’avenir.